Un régal pour les yeux !
Le lundi 11 décembre 2023
Six questions à Émeline Bayart, metteuse en scène d’Ô MON BEL INCONNU & rôle de Félicie.
Qu’est-ce qui vous a donné envie de vous plonger dans cette opérette des Années folles ?
La rencontre avec Alexandre Dratwicki, directeur artistique du Palazzetto Bru Zane, a été déterminante. Il est venu voir D’Elle à Lui, récital antidépresseur qui rend heureux que je donne depuis quelques années au Kibélé, à Paris, et m’a proposé ce projet. Je suis immédiatement tombée sous le charme de cette opérette que je ne connaissais pas et que je trouve à la fois drôle et profonde. Et bien sûr, la musique de Reynaldo Hahn porte la pièce à merveille !
En quoi l’histoire vous séduit-elle ?
J’ai aimé ces trois destins de femmes, lasses de leur vie routinière, chacune pour des raisons différentes. La première, Antoinette, mariée à Prosper depuis vingt ans, s’ennuie avec son mari colérique et sans égard. Encore jeune, belle et pleine de lumière, elle rêve d’une vie moins austère et d’un amant qui lui fera voir la vie en rose. La deuxième, Marie-Anne, fille unique du couple Aubertin, attend le prince charmant qui lui fera quitter le nid familial et les sautes d’humeur de son père. Sa fraîcheur et son émerveillement face à la vie la rendent très touchante. La troisième, Félicie, la bonne au caractère bien trempé, aspire à une vie meilleure, prête à tout quitter si un homme sympathique et doté d’une belle bourse lui offrait cette opportunité.
Qu’est-ce qui a guidé votre mise en scène ?
Guitry a un vrai talent pour allier vaudeville et saynètes aux accents mélancoliques. Son écriture enlevée et poétique m’a beaucoup inspirée. Je souhaitais que l’on retrouve dans le même espace le magasin, le petit salon où les Aubertin reçoivent leurs invités et leurs appartements. Anne-Sophie Grac, scénographe et costumière, a imaginé une véritable boîte à jouer où les protagonistes évoluent comme dans un ballet avec portes qui claquent, grand escalier et scènes picturales. L’esthétique des années 30 permet aussi une élégance que l’on retrouve dans le décor, les costumes et les accessoires. Un régal pour les yeux !
Vous reprenez le rôle de Félicie, créé à l’époque par Arletty. Pensez-vous à elle ?
Je suis très touchée qu’Alexandre Dratwicki ait autant insisté pour que je joue également Félicie. Je m’amuse beaucoup sur scène ! C’est l’écriture du personnage qui me donne la clé du rôle, et pas la comédienne qui l’a créé, mais comme Guitry l’a écrit pour elle, j’ai souhaité conserver un peu de sa gouaille, comme pour la « citer » afin qu’elle reste dans l’œuvre tel un joyeux fantôme plein de bonnes ondes. Félicie est un personnage haut en couleurs, solaire et attachant.
Que provoque en vous la musique de Reynaldo Hahn ?
De la joie et de la mélancolie. Il y a des airs, celui d’Antoinette notamment, où l’on passe du sourire à l’émotion. Hahn s’est complètement adapté à l’écriture de Guitry,
la composition musicale a du sens, les airs
de groupe en témoignent particulièrement, et c’est pour le plus grand bonheur du spectateur.
Propos recueillis par Vinciane Laumonier •